Économique
Retour28 juillet 2023
Lucie Charest - lcharest@medialo.ca
La micro-brasserie Barbe Broue est mise en vente
Les témoignages de soutien aux propriétaires pleuvent
©Page Facebook Barbe Broue Microbrasserie, crédit : Marcel Carrière
Compte tenu de la conjoncture économique actuelle, la patience et la résilience des petits entrepreneurs sont de plus en plus souvent mises à l’épreuve. La récente mise en vente de la micro-brasserie Barbe Broue illustre à quel point œuvrer dans l’agroalimentaire représente un défi encore plus grand pour ceux qui s’investissent dans leur propre entreprise.
Tout d’abord, soyons clairs, l’originalité de cette entreprise témiscamienne émane de la détermination de Carole Marcoux et Éric Lepage, deux jeunes producteurs agricoles, qui avaient été contraints à se départir de leur quota laitier à Nédélec.
« Nous souhaitions mettre à profit tout le travail qui nous avions accompli pour notre ferme laitière, a relaté Carole Marcoux. Pour nous, y créer une nouvelle production céréalière et la transformer pour alimenter notre micro-brasserie est allée de soi. Nous voulions créer quelque chose de positif, transformer notre échec dans le secteur laitier en quelque chose de constructif. Nous aurions pu mettre de côté l’argent récupéré par la vente de notre troupeau et notre quota et faire une petite vie peinarde, mais nous voulions faire quelque chose, quelque chose qui nous permette de nous démarquer. »
Une première au Témiscamingue
Et pour se démarquer, personne n’en doute, les copropriétaires de Barbe Broue n’ont eu de cesse de se renouveler dès l’ouverture de leur pub adjacent à la micro-brasserie à Ville-Marie en 2015 jusqu’au déménagement, voilà trois ans, sur la ferme à Nédélec.
« Nous n’étions pas brasseurs, nous n’avions jamais cultivé de houblon, nous partions de zéro, se souvient Mme Marcoux. Il a fallu nous entourer d’une équipe provenant de l’extérieur pour déterminer ce que nous voulions. Le permis de brasserie artisanale, comme nous avions à Ville-Marie, est restrictif. On ne pouvait pas vendre nos produits à l’extérieur du pub. »
Au cours des trois dernières années, Barbe Broue a connu un second franc succès en accueillant les visiteurs à la ferme et en distribuant ses bières à travers la région et au fil de différents événements.
« C’est sûr qu’on y a mis toutes nos énergies dans cette entreprise, nous y avons mis la jeunesse de nos enfants qu’on n’a pas pu voir autant que nous l’aurions voulu, nos Noëls, nos vacances d’été, on a tout mis dans notre entreprise, a mis en contexte Carole Marcoux. Mais notre décision de vendre est mûrement réfléchie. Nous sommes à la croisée des chemins avec notre production de 12 bières différentes. Est-ce qu’on s’agrandit, qu’on se diversifie, comment on se renouvelle. Présentement, notre entreprise a une grosseur humaine, une personne seule peut la reprendre. Et en même temps, nous sommes fatigués. »
« C’est sûr qu’on y a mis toutes nos énergies dans cette entreprise, nous y avons mis la jeunesse de nos enfants qu’on n’a pas pu voir autant que nous l’aurions voulu, nos Noëls, nos vacances d’été, on a tout mis dans notre entreprise » - Carole Marcoux
Cumul d’aléas pour les entrepreneurs
Malgré le succès de l’entreprise, une dernière plainte, parmi plusieurs autres, récemment formulée au MAPAQ, mais non retenue, a été la goutte qui a fait déborder le vase. « Ça a conforté notre choix de vendre l’entreprise, a admis Mme Marcoux, même si la plainte n’a pas été retenue, ces plaintes aux petits producteurs sont des sources de stress énormes en plus de tout ce qu’ils donnent comme travail à leur entreprise. Pour nous, une journée n’est jamais finie, quand on quitte notre travail, c’est nuit et jour qu’on y pense. »
À la suite de la publication de la mise en vente sur la page Facebook de Barbe Broue et de l’évocation des plaintes reçues, les propriétaires ont été inondés de commentaires et de messages privés liés aux plaintes mettant en cause des entrepreneurs dans le secteur de l’agroalimentaire.
« Ce n’est pas juste nous, d’entres entrepreneurs doivent négocier avec ces stress souvent inutiles, liés à des plaintes de gens venus les visiter, a-t-elle constaté. Des gens viennent, ne posent pas de question sur le fonctionnement de ton entreprise, se retournent et portent plainte sans savoir. C’est une conversation à sens unique. Ça gruge les fondations. Ça prend du temps à régler. »
Quoiqu’il en soit, selon Mme Marcoux, Barbe Broue est une entreprise bien étable, a bonne réputation et est en santé. Leur consolation est qu’elle pourra très bien continuer à vivre en changeant de propriétaires.
Lorsque nous avons demandé à Mme Marcoux si elle avait d’autres projets, sa réponse ne s’est pas fait attendre : « Avoir du temps, du temps pour moi, pour mon jardin, du temps pour finir les choses que j’entreprends. »
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